Tom Charlet-Caumont
Blockchain (publique, privée, de consortium)
Blockchain publique
➤ Définition
Une blockchain publique est un registre numérique ouvert à tous. Elle fonctionne sans autorité centrale : n’importe qui peut y lire les données, proposer des transactions ou participer à leur validation, selon un protocole de consensus décentralisé (comme la preuve de travail ou la preuve d’enjeu).
Les blockchains publiques sont conçues pour maximiser la transparence, la résilience, et la censure-résistance. Chaque modification du registre est visible, traçable et immuable.
Elles sont souvent utilisées dans les cryptomonnaies, les applications Web3, les DAOs ou les systèmes d’identité décentralisée, car elles incarnent les principes fondateurs de la décentralisation et de l’ouverture.
Exemples
Bitcoin (BTC)
Ethereum (ETH)
Tezos, Solana, Polkadot
➤ Caractéristiques principales
Avantages
Transparence totale
Résilience extrême (pas de point unique de défaillance)
Censure quasiment impossible
Alignement avec les idéaux du Web3 et des communs numériques
Inconvénients
Moins efficace pour des usages internes d’entreprise
Transactions lentes et coûteuses sans couche secondaire
Anonymat relatif (pseudonymat, mais traçabilité élevée)
➤ Cas d’usage typiques
Cryptomonnaies
NFT et propriété numérique
Services d’identité décentralisée (ENS, etc.)
Stockage et certification de données publiques
Blockchain privée
➤ Définition
Une blockchain privée est une infrastructure où l’accès est restreint à une seule organisation ou un nombre limité de participants autorisés. Contrairement aux blockchains publiques, elle n’est pas ouverte au grand public, et les droits de lecture, d’écriture et de validation sont entièrement contrôlés.
Elle repose souvent sur une architecture centralisée, avec un administrateur qui définit les règles d’usage.
Son principal intérêt est de permettre des transactions rapides, peu coûteuses et confidentielles, adaptées aux besoins internes d’une entreprise (comme la traçabilité, la comptabilité ou l’automatisation de processus via des contrats intelligents).
La blockchain privée sacrifie la décentralisation au profit de l’efficacité et du contrôle.
Exemples
Hyperledger Fabric (IBM, Linux Foundation)
Quorum (JP Morgan)
Corda (R3)
➤ Caractéristiques principales
Avantages
Très rapide et performant
Coûts faibles
Facilement adaptable aux besoins internes d'une organisation
Contrôle total sur les données
Inconvénients
Manque de transparence et d’ouverture
Risque de corruption ou de censure
Moins résiliente (point de défaillance central)
Moins compatible avec l’écosystème public
➤ Cas d’usage typiques
Traçabilité interne (chaînes logistiques, audit interne)
Finance d’entreprise (automatisation des règlements)
Partage de données dans un contexte réglementé (santé, assurance)
Systèmes de vote ou d'enregistrement interne
Blockchain de consortium
➤ Définition
Une blockchain de consortium (ou blockchain fédérée) est un modèle hybride entre la blockchain publique et la blockchain privée. Elle est contrôlée collectivement par un groupe d’acteurs (entreprises, institutions, organisations gouvernementales…) qui en définissent ensemble les règles de gouvernance, les droits d’accès et les mécanismes de validation.
Chaque membre du consortium agit comme un nœud validateur, garantissant un équilibre des pouvoirs et une fiabilité inter-organisationnelle.
Ce modèle est particulièrement adapté aux situations où plusieurs entités doivent collaborer sur un même registre, sans qu’aucune ne puisse en prendre le contrôle exclusif. Il est couramment utilisé dans les secteurs de la finance, de l’énergie, de la logistique ou de l’administration publique.
Exemples
EWF (Energy Web Foundation)
Marco Polo (finance commerciale)
Food Trust (IBM + partenaires)
LACChain (Amérique latine)
➤ Caractéristiques principales
Avantages
Compromis entre efficacité et décentralisation
Contrôle partagé → gouvernance plus robuste
Adapté à la collaboration inter-entreprises
Plus compatible avec la confidentialité réglementaire
Inconvénients
Coordination complexe
Risque de désaccord entre membres
Moins transparent qu’une blockchain publique
Moins agile qu’une blockchain privée
➤ Cas d’usage typiques
Réseaux bancaires (paiement interbancaire, KYC)
Marchés de l’énergie ou des matières premières
Registres de propriété communs
Coopération entre gouvernements et entreprises
Conclusion : Quelle blockchain pour quel usage ?
La distinction entre blockchains publiques, privées et de consortium ne repose pas uniquement sur des critères techniques, mais sur des choix structurels de gouvernance, d’accès et de confiance. Chaque type répond à des besoins bien spécifiques :
Les blockchains publiques incarnent l’idéal de la décentralisation totale et de l’ouverture, adaptées aux systèmes monétaires, aux identités numériques ou aux organisations autonomes.
Les blockchains privées, plus centralisées et efficaces, sont optimisées pour les processus internes d’entreprise où la performance et la confidentialité priment.
Les blockchains de consortium offrent un compromis équilibré, idéal pour des écosystèmes collaboratifs où plusieurs acteurs doivent partager des données ou coordonner des actions de manière transparente mais contrôlée.
Comprendre ces distinctions permet de mieux choisir l’infrastructure adaptée à un projet, selon le degré de confiance entre les parties, le besoin de transparence, et les contraintes réglementaires ou techniques.
Dans un contexte où les blockchains s'étendent bien au-delà des cryptomonnaies, cette typologie est essentielle pour penser l’avenir de l’architecture numérique distribuée, que ce soit dans la finance, les institutions publiques, les jeux vidéo ou l’industrie.
2025